Visite à Montreux-Vieux de M. Alexandre Millerand Ministre de la Guerre
C’est le 27 novembre 1914 que me Ministre de la Guerre Alexandre Millerand, accompagné du général Thévenet Gouverneur militaire de Belfort a franchi la ligne de la frontière désormais abolie entre Foussemagne et Chavannes-sur-L’Etang pour se rendre d’abord à Montreux-Vieux ou les troupes sur son passage rendaient les honneurs.
Le Gouverneur guida le Ministre vers la salle d’école. Un spectacle émouvant, qui les attendait la, est décrit par le Bulletin de Armées du 3-5 Décembre 1914 page 437.
A leur entrée une centaine d’enfants de tout âge se levèrent d’un même élan et, d’une même voix, ils entonnèrent la « Marseillaise »
Debout devant la chair, leur maitre, un caporal les surveillait et donnait la cadence. Au fond, dans les couloirs sur les marches de la porte et jusque dans les rues les anciens qui n’avaient pas oublié, accompagnaient les enfants.
Dans le profond silence qui suivit, le ministre, en quelques paroles sobres, exprima les tristesses des quarante quatre années passées et la fierté qu’éprouve aujourd’hui la France en songeant à la libération prochaine et totale de l’Alsace. Puis par Valdieu et Retzwiller le ministre gagna Dannemarie. Aux embranchements des routes on pouvait lire :
Alexandre Millerand a été président de la république au cours de la 3ème République du 23 septembre 1920 au 11 juin 1924
Alexandre Millerand est revenu à Montreux-Vieux avec le Président Poincaré le 12 février 1915
Autre article
M. MILLERAND ASSISTE EN ALSACE À UNE LEÇON DE FRANÇAIS
Le Bulletin des Armées publie, ce matin, l’article suivant :
Le ministre de la Guerre s’est rendu récemment en Alsace. Le premier, depuis l’année terrible, il visitait en tant que membre du gouvernement la province perdue. Ce n’est pas sans émotion que, le 27 novembre 1914, vers neuf heures du matin, après avoir inspecté, en compagnie du gouverneur de Belfort, quelques-uns des ouvrages de la forteresse, le ministre de la Guerre franchit, entre Foussemagne et Chavannes-sur-l’Etang, la ligne qui, pendant un demi-siècle, marqua l’ancienne frontière.
Bien qu’on fût en campagne, dans la grande rue de Montreux-Vieux, des troupes immobiles comme il la parade, rendaient .les honneurs ; leurs clairons sonnaient « Aux champs »
Le gouverneur de Belfort guida le ministre vers la saille d’école. A leur entrée, une centaine d’enfants de tout âge se levèrent d’un même élan et d’une même voix, ils entonnèrent la Marseillaise.
Debout devant la chaire, leur maître, un caporal d’infanterie, les surveillait et donnait la cadence. Au fond, dans les couloirs, sur les marches de la porte et jusque sur la rue, les vieux qui n’avaient pas oublié accompagnaient les enfants.
Une émotion indicible étreignait l’assistance et les larmes lentement coulaient sur les joues fraiches comme dans les barbes grises « Aux armes, citoyens! » reprenaient les voix enfantines et tandis que le chant de nos pères franchissant les murs de la salle roulait sur la campagne, chacun du fond de son cœur adressait un hommage de gratitude émue aux vaillants qui dorment à Uffoltz, à Cernay, à Aspach, à Dornach, à Flachslanden, à Zillisheim et là, tout près à Montreux-Vieux, car c’est leur sacrifice qui permettait la joie de cette inoubliable scène.
Dans le profond silence qui succéda a l’hymne national, le ministre de la Guerre, vainquant avec peine son émotion, exprima en quelques paroles sobres les tristesses dont souffrirent les cœurs français pendant ces quarante-quatre dernières années et aussi la fierté fut éprouvé aujourd’hui la France en songeant à la libération prochaine et totale de la vieille Alsace. II dit aux petits de cette province le fidèle souvenir des enfants de France.
Lorsqu’il quitta Montreux, il emportait l’impérissable souvenir d’une première leçon de français, heureuse et symbolique contrepartie du conte de Daudet. > Par Valdieu et Retzviller, le ministre de la Guerre gagna Dannemarie. Les maisons étaient .pavoisées; à toutes les fenêtres se déployaient les couleurs rouges et blanches de l’Alsace et, dans les rues, de petits bonshommes de Hansi, aux têtes blondes, aux cheveux bouclés, ouvraient bien grands leurs yeux bleus pour mieux voir le représentant de l’armée française. Aux embrassements des routes, on pouvait lire : « Belfort, 24 kilomètres ». Il avait suffi, en effet, de retourner les plaques routières pour retrouver les anciennes indications en française
Après un court arrêt à l’hôtel de ville, le ministre de la Guerre s’est rendu à l’est de Dannemarie jusqu’à la Tuilerie pour visiter les tranchées et faire un tour d’horizon dans la plaine boisée qui mène vers Huningue, AItkirch, Mulhouse, Colmar et vers Strasbourg. Au nord. il, distinguait mal la crête embrumée des Vosges. Entre les bois noirs, les clochers découvraient leur silhouette sur le ciel gris ; ; les cloches se répondaient à travers la plaine couverte de neige et, dans les tranchées où l’on est aujourd’hui face à face, le grand drame continuait sans trêve.
Le ministre de la Guerre est rentré à Belfort par, Magny, village ou fut assassiné l’enfant au fusil de bois, la vallée de la Largue et Delle.
Sources : Excelsior 5 décembre 1914