La Loupe d’orme

LA LOUPE D’ORME

Parfois dans les forêts de ligneuses boursouflures

Donnent aux troncs des arbres des allures curieuses.

L’orme s’affuble ainsi de l’enflure monstrueuse ;

Son fût semble malade, mais saine est sa ramure.

 

De cette masse informe qu’on appelle « la loupe »

Longtemps les menuisiers négligèrent le bois.

Tous ces arbres difformes finissaient à la coupe,

Et l’horrible excroissance, au bûcher, chaque fois.

 

Jusqu’au jour où la main d’un artisan habile

Saisit un des broussins, misérable déchet ;

Pour façonner la chose, il s’acharna, fébrile,

Mettant tout son talent pour faire un bel objet.

 

L’art a parfois le don de transformer les choses

Telles ces créations, anciennes exostoses,

Tant de chefs d’oeuvre insignes, sont vieilles plaies et souffrances !

D’une matière brute, hideuse en apparence,

Poème, symphonie, tableau, souvent jaillissent.

Au lit d’obscurs terreaux, des fleurs s’épanouissent.

 

Parmi peines et souffrances, faites que Beauté règne.

Tant pis s’il faut tremper la plume au tronc qui saigne.

 

Pia PAUGET née KIRSTETTER

                                                                  Loupe d’arbre

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