LA JEUNE FILLE LA PLUS MERITANTE DE FRANCE
Hélène Vonbank
Nom : Vonbank — Prénom : Hélène. — Date.et lieu de naissance : 2 février 1896, à Mulhouse {Haut – Rhin}. — Adresse actuelle : Montreux-Vieux, chez M. Seb. Goetz. — Profession . : Ménagère. — Personnes a sa .charge : deux, Mme Goetz, {68 ans, paralysée ; M. Goetz, 73 ans. Il n’y a pas de parenté. Le fils dés époux Goetz était marié en premières noces avec la tante d’Hélène.
C’est en Alsace, à Montreux-Vieux, qu’Hélène Vonbank mène, un peu ,à l’écart du paisible village, sa vie de dévouement et de sacrifices. N’imaginez pas notre héroïne coiffée du large ruban de satin noir, ni vêtue de la coquette robe dont le corsage laissé voir la fine dentelle de la chemise et dont la jupe, courte et froncée, se balance si gracieusement ! Des rubans ? La .pauvre fille n’en a jamais porté, ni acheté, ni même peut-être sérieusement désiré. Quant aux dentelles, elle ne se préoccupe que de celles qu’elle fait à la veillée pour en tirer un peu d’argent.
Hélène Vonbank est née à Mulhouse, le 2 février. 1896. Si son acte de naissance porte : de père et mère inconnus, sa mère (dont la vie n’était pas exemplaire) ne l’abandonna pas complètement et la mit en nourrice chez une « brave femme de Mulhouse.. La petite Hélène, chétive, atteignit ainsi sa septième année, puis elle fut confiée à la garde de mauvaises gens qui rendirent l’enfant si malheureuse que la mère, insouciante, se décida enfin, au bout de deux ans, à la sortir dé cet enfer pour la garder, pensant bien sans doute qu’à neuf ans la fillette pourrait déjà lui servir de domestique. C’est ce qui arriva.
Quatre années. Hélène vécut ainsi, à Mulhouse, s’occupant de l’intérieur sans être surveillée, malmenée parfois sa mère, qui souvent rentrait ivre au logis. Seule, une tante maternelle — son unique parente — avait pour l’enfant un peu d’attention. Cette tante était l’épouse d’un certain Eugène Goetz, originaire de Montreux-Vieux, où le père, Sébastien Goetz, employé aux transports internationaux, et la mère, née Faber, exerçant la profession de sage-femme, habitaient une petite maison au milieu d’un beau verger, à proximité de la gare. Eugène Goetz était a cette époque sous-officier dans, l’armée allemande et rengagé dans l’espoir d’obtenir plus tard un poste de fonctionnaire dans l’Empire.
En1909, alors qu’elle venait d’avoir 55 ans, Mme Sébastien Goetz fut frappée d’une attaque de paralysie qui lui laissa les jambes inertes. Tous les soins furent vains ; la pauvre femme fut condamnée à vivre dans son lit ;non seulement elle ne pouvait plus s’occuper de son ménage, mais encore son état exigeait des soins incessants de jour et de nuit. Il devenait donc indispensable d’avoir quelqu’un pour soigner Mme Sé bastien Goetz et la remplacer dans son intérieur. Mais une domestique, il faut la payer, et pareille dépense était impossible pour des ouvriers. Et puis, où trouver celle assez dévouée et courageuse pour assumer pareille tâche triste et fatigante ? C’est alors que la belle-fille de la pauvre impotente pensa que sa jeune nièce Hélène pourrait, au moins en attendant une autre solution, rendre quelques services dans ce foyer, bouleversé. Et elle, au moins, on n’aurait pas à la payer.
Hélène Vonbank, on s’en souvient, vivait alors à Mulhouse avec sa mauvaise mère, dont elle était littéralement la servante. Résignée et dévouée malgré son sort malheureux, la fillette savait déjà entretenir un modeste intérieur, préparer la nourriture, laver le linge, alors que tant d’enfants de son âge et de sa condition n’ont pas encore eu le temps d’apprendre tous les jeux qui font la joie des premières années de la vie.
Hélène vient à Montreux-Vieux et commence, sans gages, son service chez les époux Goetz. Elle a treize ans. Le travail ne l’effraye pas : elle connaît çà depuis longtemps I Ce qui la surprend agréable ment, c’est d’être bien traitée, avec dou ceur, et ne sachant pas encore ce que c’est que l’affection, elle goûte une joie incon nue et s’attache bien vite à se3 maîtres. L’argent ? Peu lui importe ! Jusqu’en 1914. – la vie s’écoule ainsi pour elle : le matin, tandis que M. Goetz est parti à son travail, elle lave et, peigne Mme Goetz, fait le ménage et prépare le déjeuner. Elle est gaie, chante et distrait l’infirme, qui a toute sa -tête, mais doit rester couchée toujours et passe son temps à quelques travaux d’aiguille ou de dentelle. L’après midi, Hélène entretient le jardin et s’occupe du dîner.
Avec la guerre, une autre catastrophe arrive pour Hélène : M. Goetz tombe malade, il doit cesser tout travail, puis ne peut plus même quitter -son fauteuil. Les maigres ressources se trouvent réduites à presque rien. Ce qui sauve peut-être ce foyer, c’est, que le temps que dure: la guerre, des soldats français, occupent la région et que les quinze qui se succèdent-toujours chez les Goetz savent se montrer recon naissants des continuels services que leur rend Hélène avec bonne humeur.
De 1914 à la fin.de 1918, Hélène vit ainsi. Pour elle, les événements marquants sont qu’elle a perdu sa mère, puis sa tante, et qu’elle a appris le français avec nos sol dats, car .jusque là elle ne parlait que l’alsacien. Pour le reste, il lui paraît que rien ne soit changé dans, sa vie. Et pourtant I Ce n’est plus un infirma qu’elle soigne, mais deux, car, à son .tour, M. Goetz est définitivement immobilisé dans son lit, maussade et grognon. Au début de 1919, le ménage Goetz dispose comme ressources dune rente d’invalidité de 41 fr. 65 par moi plus un secours d’ancien.combattant de la guerre de 1870 de 15 fr. 60. Ajoutons à cela une centaine de francs envoyés mensuellement par le flls, Eugène Goetz, remarie, et qui a repris dans l’administration française, le poste de .douanier qu’il avait obtenu, .avant les hostilités, de l’Empire, après douze ans passés dans l’armée allemande (1). Cent cinquante francs par mois ! C’est maigre pour nourrir trois per sonnes. Hélène, avec un instinct merveilleux, trouvé le moyen d’augmenter ces faibles ressources. Patiemment, elle réussit à constituer une petite basse-cour; elle réalise ce tour de force d’avoir à elle trois chèvres ; elle engraisse-quelques lapins. Il ne lui en coûte, selon elle, pour tout cela, qu’un peu plus de mal : il faut conduire les chèvres aux champs, mais elle a .dû; lait ; avec les œufs qu’elle vend, elle achète du grain pour la volaille ; quant à la nourriture des lapins,, eh bien ! elle part avec sa faucille « faire de l’herbe». Actuellement, toute simple qu’elle soit, sans instruction, n’ayant jamais rien vu que vaguement un faubourg de Mulhouse ayant ses treize ans, et depuis, le petit village de Montreux-Vieux, elle est l’âme de ce triste foyer, empressée à soigner deux malades ne quittant pas leur lit, et subvenant à tous les besoins.
Un de ces derniers matins, guidé par l’aimable instituteur de Montreux-Vieux, je suis allé jusqu’à la demeure. des époux Goetz, la. petite maison à moitié cachée dans la verdure, au milieu d’un beau verger en bordure du chemin-de fer. Dès que nous appelons devant la barrière du jardin, la porte de la maisonnette s’ouvre et une petite femme, courte sur jambes, apparaît, étonnée : c’est Hélène Vonbank. Très brune, la peau mate, elle a de grands yeux noirs infiniment doux et, dans sa pauvre personne, c’est tout ce qui peut charmer un moment. Intriguée, elle nous conduit dans une petite chambre à gauche, modeste mais propre, où Mme Goetz me tend la main de son lit. Ce qui se passe alors, on le devine : j’’interroge, et les réponses c’est toute l’histoire qui précède. Apprenant ce que je viens faire. Hélene va aussitôt mettre au courant M. Goetz, qui occupe une autre chambre à droite dans la maison, puis elle retourne à ses occupations, trouvant sans intérêt pour elle ces choses qui lui paraissent si naturelles. Quand, un peu puis tard, je la prie de revenir près de moi un moment, elle se plaît surtout à me montrer lès souvenirs .que les soldats français lui, ont laissés en remerciement de ses services et qui sont accrochés au mur en bonne place. Puis elle me parle de ses bêtes, et son visage s’éclaire. Je vais avec elle jusqu’au verger où picorent une trentaine dé poules et broutent les trois chèvres qui bêlent en la voyant. — Elles sont gentilles, me dit-elle. J’aime bien leur parler… Ah tenez, monsieur, voici mes canards ; il n’y à pas longtemps que j’ai pu les acheter, tout petits, parce qu’alors ils coûtent peu. Je suis bien contente car, vous savez, çà se vend ; bien quand ils sont gras.. En petite maîtresse, simplement et déjà familiarisée, elle me dit alors ce qu’il faut faire pour le jardin et les bêtes, et en quelques phrases elle me démontre qu’elle n’a presque rien à acheter pour la nourriture des trois personnes du foyer.
:— Mais ne sortez-vous jamais, Hélène ?
— Oh ! si quelquefois. Un voisin m’aide à mettre maman (c’est Mme Goetz) dans une petite voiture, les dimanches qu’il fait beau, et je la promène un peu, jusqu’au village… çà lui fait bien plaisir.
Que les deux vieux époux Goetz soient heureux, voilà.la seule préoccupation d’Hé lène Vonbank. N’ayant jamais reçu de gages, elle n’a jamais possédé un sou, et sin cèrement elle n’y pense-pas; Sans rien à elle, san3 coquetterie, sans aucune des dis tractions simples qu’on peut avoir dans un village, elle vit suivant la destinée qu’elle a choisie : rester auprès des vieux infirmes et leur assurer l’existence qu’elle leur procure depuis treize années déjà, et cela, jusqu’à-leur dernier jour
Jean Clair Guyot
JEAN CLAIR-GUYOT. TRES IMPORTANT. — Nos lecteurs trouveront page 2 un écusson au nom d’Hélène Vonbank. Cet écusson devra être découpé et conservé pour être joint avec tous les autres —sous peine d’annulation — au bulletin de vote qui sera envoyé plus tard.
- Il est bon de dire qu’Eugène Goetz, élevé par ses parents dans l’amour de. la France, est maintenant un excellent fonctionnaire français et que dernièrement il obtint de l’avancement pour avoir arrêté dans la 5:one d’occupation un redoutable contrebandier allemand
Sources L’Echo de Paris 21 septembre 1922
On pouvait lire dans la Revue du Rhin et de la Moselle page 230 du 5 janvier 1923 : Parmi les lauréates du concours des jeunes filles de France les plus méritantes, organisé par notre confrère L’Echo de Paris, cous sommes heureux de relever le nom d’une Alsacienne, Mlle Hélène Vonbank, habitant Montreux-Vieux (Ht Rhin), qui reçoit une donation de 3.000 francs. Toutes nos félicitations.
Autre article concernant HélèneL ‘Alsace Française du 30 septembre 1922
Au lendemain d’une guerre, où toute une jeunesse frémissante atteignit au sommet de la vaillance, poursuivit pendant quatre ans sans défaillance une destinée tragique, et, soutenue par l’armature de l’armée, développa, exalta ses ressources de courage et son acceptation de sacrifice, nul ne songe à contester les mérites d’une race capable de tous les miracles. Mais il y a des héroïsmes ailleurs que sur les champs de bataille. Et les vertus qui apparaissent
dans tout leur éclat, embellies par la mort, parmi le décor de la guerre, se retrouvent plus humbles, plus modestes, mais non moins émouvantes, dans la vie de tous les jours. Elles continuent d’inspirer le peuple des cités grises et des campagnes ensoleillées.
La femme dispute alors à l’homme la souveraineté du mérite. Ce ne sont plus des circonstances exceptionnelles, des jours dont on ne sait pas le nombre, mais qu’on sait comptés, des heures où l’on parvient à se surpasser soi-même, mais la vie habituelle, sans changement, l’éternel appel à la patience, à l’énergie pour vaincre les difficultés, messagères du découragement.
En ouvrant une enquête destinée à découvrir la jeune fille la plus méritante de France, l‘Écho de Paris démontre combien le choix est embarrassant, si nombreuse est la phalange des appelées. Toutes celles dont ce journal révèle la grandeur morale rivalisent de hautes qualités. Cette série de portraits, à vrai dire, n’étonne pas. On soupçonne depuis longtemps l’abondance de vertus répandue dans le peuple de France. Mais chaque fois que l’on est mis en
présence de ces gloires secrètes du pays, on est gagné par l’émotion.
Si l’une des premières jeunes filles, dégagée de l’ombre, se trouve être une Alsacienne n’y voyez
pas un jeu du hasard. L’Alsace est terre d’âmes vaillantes. Les noms de ses fils rayonnent entre les pages de l’histoire de France et pendant le demi siècle où elle dut subir le titre de Reichsland, douloureux comme un joug, elle ne consentit pas à vendre ses véritables sentiments en échange de sa tranquillité. Elle portait en elle des provisions de résistance qu’une longue lutte d’usure ne parvint pas à épuiser et l’exemple d’Hélène Yonbank, dont M.
Clair-Guyot entretient ses lecteurs de l’Écho de Paris, le prouve d’une façon bien touchante.
Ces deux colonnes de journal représentent probablement l’unique biographie de cette enfant brune, à la peau mate, dont la douceur s’est réfugiée dans ses yeux noirs. Elle aurait pu continuer, ignorée de tous, son existence sans éclat, si la bonté, sur la piste du mérite, n’avait été amenée devant une petite maison de Montreux-Yieux, dissimulée dans la verdure,
en bordure du chemin de fer. Là habite Hélène Yonbanck. Oh! elle n’est pas propriétaire!…. elle y tient le ménage d’un vieux couple, handicapé par l’âge, la maladie et la misère. Comment cette jeune fille de vingt – six ans a – t – elle abordé à ce modeste hâvre, après une enfance cruelle
Son acte de naissance, à la Mairie de Mulhouse, porte la date du 2 février 1896, père et mère inconnus. Enfant trouvée? Non, enfant du hasard. Sa mère gênée dans sa carrière par cette maternité indésirée mit son bébé en nourrice chez une brave femme de la ville. Hélène grandissait chétive et sage. A sept ans. elle fut confiée à de misérables gens, sans pitié. La mère insouciante,, mais non insensible, estima sa fillette en âge de lui servir de domestique et la prit avec elle.
Pendant quatre ans, elle vécut ainsi, servante de sa mère, privée de tendresse, bousculée, malmenée par cette maman « qui souvent rentrait ivre au logis ». Dans les milieux les plus étranges on rencontre parfois des âmes bonnes. La petite Hélène apitoya une tante maternelle, son unique parente, femme d’Eugène Goetz, sous-officier allemand et qui comptait sur ses annuités militaires pour obtenir plus tard un poste de fonctionnaire dans l’administration impériale. Eugène Goetz n’éprouvait pas pour le Reich une sympathie particulière, il s’était
résigné à accepter la règle de l’opportunisme. Aujourd’hui, douanier français, excellent fonctionnaire, il a obtenu dernièrement de l’avancement « pour avoir arrêté dans la zone d’occupation un redoutable contrebandier allemand ».
Les parents d’Eugène Goetz vivaient modestement à Montreux-Vieux, lui, prénommé Sébastien, employé aux transports internationaux, elle, sage femme. Or, en 1909, Mme Sébastien Goetz fut at-teinte de paralysie aux jambes. Les médecins déclarèrent la maladie incurable. La pauvre créature,à 55 ans, était condamnée à achever le reste de sa vie, au lit. Cette situation bouleversait le foyer. Il fallait une personne à demeure pour soigner Mme
Goetz et tenir le ménage. Une domestique? Déjà à cette époque, une domestique était un luxe impossible à supporter pour le budget de ces petites gens. C’est alors que leur bru suggéra l’idée d’envoyer Hélène Yonbank à Montreux-Yieux. Elle serait ainsi soustraite à l’existence sans charme qu’elle menait auprès de sa mère, et pourrait utilement, en attendant mieux, y faire valoir ses connaissances de ménagère, de cuisinière, de lingère.
L’enfant, élevée sans plaisirs et sans jeux, part à Montreux-Yieux. Point de gages et beaucoup de travail! La besogne ne l’effraie pas et l’argent n’importe guère à sa nature simple et dévouée, active et jeune (elle a treize ans). De n’être plus maltraitée la surprend. L’affection, dont elle ignorait jusqu’alors la douceur, éveille en elle la joie de vivre, l’attachement à ses maîtres. Elle chante et remplit la maison de gaieté, s’empresse auprès de la malade, et se distrait en faisant de la dentelle ou en jardinant.
Ainsi vivait Hélène Yonbank avant la guerre.
Mais la guerre survient et en 1914, M. Goetz, à son tour, est frappé de paralysie et ne peut plus même quitter son fauteuil. C’est été la détresse matérielle, si l’armée n’avait établi un cantonnement permanent dans la maison. Les régiments se succèdent, mais toujours une escouade de quinze soldats profite du couvert et des soins diligents de l’aimable enfant. Les poilus français, de si humble extraction soient-ils. continuent la tradition des gentlhommes. Serviables, bon garçons, complimenteurs mais respectueux, ils témoignent leur reconnaissance
à la petite Alsacienne, en lui apprenant le français, elle qui ne parle que son dialecte.
Sa mère et sa tante meurent. Orpheline, cela ne change rien à sa vie: elle passe-sa jeunesse entre les deux vieillards infirmes, car Sébastien d’un naturel grognon et maussade est lui aussi immobilisé dans, son lit.
Voici le budget mensuel du ménage au début de 1919:
rente d’invalidité 41.65 frs. secours d’ancien combattant de 1870 15,60 frs. rente faite à ses parents par le douanier Eugène Goetz 100,— frs. 157,25 frs. par mois pour trois personnes, ce n’est guère. Hélène, petite fée, pleine d’initiative, sans négliger en rien les soins à donner à Philémon et Baucis, parvient à accroître ces faibles ressources.
Elle réussit à posséder par un miracle d’économie une basse-cour, trois chèvres, quelques lapins.
Elle vend les œufs de ses poules et prélève sur ce léger commerce de quoi acheter le grain pour nourrir la volaille. Elle mène les chèvres aux champs et tout en les gardant, « fait de l’herbe », afin d’engraisser ses lapins. Elle n’est pas instruite, la petite fermière, ses yeux n’ont contemplé d’autre horizon qu’un faubourg de Mulhouse et le village de Montreux-Vieux, et pourtant elle est femme avertie, infirmièrère et maîtresse de maison. L’intelligence du cœur l’inspire.
Aujourd’hui une trentaine de poules picorent au verger et trois chèvres bèlent de plaisir en voyant Hélène s’approcher d’elles.
— Elles sont gentilles, dit-elle au visiteur. J’aime bien leur parler… Ah! tenez, Monsieur, voici mes canards, il n’y a pas longtemps que j’ai pu les acheter, tout petits, parce qu’alors ils coûtent peu. Je suis bien contente, car, vous savez, ça se vend bien, quand ils sont gras. Et la jeune fille, sans songer à ses mérites, retourne au chevet de ceux dont elle veut égayer les dernières années.
Hélène Vonbank sera-t-elle élue, par les suffrages sollicités, comme la jeune fille la plus méritante de France? Aux cœurs des Alsaciens elle apparaît comme l’image des vertus de notre province, et digne d’une récompense qu’elle n’attend pas. Si une autre lui était préférée, il resterait encore le Prix Montvon. L’adolescente de Montreux-Vieux ne sera pas oubliée.
G. B.
Sources: L’Alsace Française du 30 septembre 1922
On pouvait lire dans la Revue du Rhin et de la Moselle page 230 du 5 janvier 1923 : Parmi les lauréates du concours des jeunes filles de France les plus méritantes, organisé par notre confrère L’Echo de Paris, cous sommes heureux de relever le nom d’une Alsacienne, Mlle Hélène Vonbank, habitant Montreux-Vieux (Ht Rhin), qui reçoit une donation de 3.000 francs. Toutes nos félicitations.